"Réhabilité"

Du vêtement à l'objet social.

 

Stéphanie Guerrier

 


L'ESS (économie sociale et solidaire) est une conception alternative de l'économie que j'ai voulu explorer dans cette démarche de design, questionnement fondamental du projet ré-habilité. Il va de soit qu'il faut tout d'abord comprendre ce qu'est l'ESS. 

Succinctement alors, c'est coopérer et agir ensemble pour entreprendre. L'argent devient un vecteur social qui permet d'améliorer notre quotidien sans but spéculatif.
L’intérêt collectif prévaut donc au gonflement du porte monnaie: c'est penser une société qui remet l'homme au cœur de l'économie. Mais j'ai découvert avec ce projet que pour comprendre le concept de l'ESS il fallait en faire l'expérience et confronter son utopie à celle du design et du designer. Car ceux-ci semblent diamétralement opposés : là où le design est né pour nuancer notre société industrialisé, l'ESS prend le contre pied et « tend à ébranler partiellement ou totalement l'ordre des choses qui règnent à ce moment » (Mannheim & Rollet, 2001).
C'est donc avec l'ambition de créer des ponts entre ces deux pratiques que j'ai ancré le projet dans une ressourcerie, celle de Clermont-Ferrand : “Je Recycle Parc” (http://www.jerecycleparc.org/). Les personnes qui travaillent chez JRP œuvrent pour une transition de notre mode de traitement des déchets. Ils récupèrent divers matériaux et objets usagers qu'ils tentent à valoriser (recyclage, réemploi, vente) et agissent ainsi pour l'environnement à travers le développement d'une économie solidaire et de coopération. 

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La problématique de design est survenue lorsqu'ils ont évoqué la difficile valorisation du textile qu'il collectent. Celui-ci s'entassait et s’abîmait dans leurs locaux sans qu'ils puissent trouver un voie de recyclage. Cela fut le parfait prétexte pour questionner un potentiel design de l'ESS. Ré-habilité, part du constat simple que le textile est une ressource inexploitée et que Je Recycle Parc ne souhaite pas en faire une source de profit et préfère que les citoyens soient sensibilisés et conscients de ce problème bien réel. Il est alors proposé aux enfants des écoles avoisinantes et de l'agglomération, de trier, couper, déchirer, nouer, transformer et jouer avec ce textile à travers différents types d'ateliers qui empruntent aux techniques traditionnelles de l'artisanat. Les enfants apprennent alors un savoir-faire dans le but d'être les créateurs d’événements ludiques et culturels (carnavals, spectacles, festivals...) C'est en créant de l'animation autour de ce problème textile que les enfants sont sensibilisés et deviennent porteurs du message. Les outils low-tech créés pour animer ces ateliers ont été mis à l'épreuve une première fois dans une autre ressourcerie : “À l'Est des Bennes” (Saint Menoux) où j'ai pu comprendre que ces outils questionnent également la collaboration dans la conception des objets textiles, concept nécessaire à la construction d'une économie sociale et solidaire.